Elle le sentait enfin, sa vengeance venir à bout, la liste de noms diminuait petit à petit. Narcissa rayait toujours les noms avec un certain plaisir, la coréenne n’avait toujours voulu qu’une chose, rendre la dignité et la fierté que les Gyeon avait perdu après une trahison, après leurs décès. Elle faisait les choses dans l’ombre, cachant la triste vérité à Kain, jamais elle ne se le pardonnerait si elle en venait à découvrir la vérité. Pas qu’elle se venge, non, ça il le savait déjà. Ce qu’il se passait après, la triste réalité de ce que Narcissa devenait, l’utilisation abusive de son pouvoir l’affaiblissait plus qu’elle ne voudrait le croire.

Encore aujourd’hui, c’était une preuve que son esprit et son corps lâchait petit à petit, mais de façon violente. Narcissa n’était plus que spectatrice de sa propre fin. Elle avait torturé pendant des heures un des traqueurs de Halite, faisant tout en son pouvoir pour obtenir les informations dont elle avait besoin. Dans ce genre de moments, c’était une toute autre femme, plus aucun éclat dans son regard, son sourire en coin, et son esprit qui réclamait juste du sang. Voilà ce qu’il se passait.

***

Tout était fini, le corps était gisant au sol et Narcissa avait fini ce qu’elle devait faire. Son corps était épuisé, son esprit fatigué. Elle s’éloignait, titubante. Elle perdait toute notion d’espace et de temps, son esprit divaguait. Et maintenant elle avait l’air d’une idiote, la jeune femme tournait en rond, elle se sentait perdue, ne sachant pas où aller. Sa vision se troublait, la fatigue prenait le meilleur d’elle. Même en oubliant qui elle était, ce qu’elle était et où elle était, Narcissa n’arrivait jamais vraiment à oublier les regards des passants sur elle, le jugement qu’elle ressentait. Les larmes séchées sur ses joues, son regard perdu et la folie s’installant doucement. Elle voulait lâcher prise, elle ne faisait pas attention où elle marchait, ses mains tâchées de sang n’aidait pas.

L’esprit de Narcissa se brouillant, la noirceur prenant la place, la noyant.

La routine était à présent bien installée, les clients habitant le quartiers venaient chercher leurs douceurs matinale de façon régulière et ceux venant de l'autre côté de Séoul commençaient à arriver à leur tour. Une bonne chose pour les ventes, mais ça voulait aussi dire préparer de plus grosses quantités et prendre plus de commandes , le tout sans perdre en qualité. En plus, même si l'idée ne lui plaisait toujours pas des masses, les deux paires de mains supplémentaires, envoyées par papa, lui facilitaient grandement la tâche. En somme, son travail commençait enfin à porter ses fruits.

Peut-être qu'il pouvait adopter un frère ou une soeur pour Nina du coup ? Les refuges ne manquaient pas de chiens ne demandant qu'à trouver une famille pour la vie après tout. Toutes les préparations pour la journée étant prêtes, la seconde moitié déjà au four, embaumant le café et ses alentours d'une douce odeur sucrée, Chan entreprit de congédier ses assistants et sortit arroser les plantes bordant la façade du bâtiment. De bonne humeur, sa gorge se mit à vibrer, le laissant humer l'air d'une chanson populaire.

Quelque chose attira cependant son attention, coupant court à ce moment de paix. Là, dans le reflet, une femme semblait errer. Sa chevelure folle, son épaule et ses pieds nus, tout ça, ça allumait des signaux d'alarme dans son esprit. Une victime droguée pour être vendue ? Sans vraiment y réfléchir, ses mains lachèrent l'arrosoir et son corps se jeta dans sa direction en la voyant s'approcher dangereusement de la route. Avant que son pied ne touche la voie, le pâtissier parvint à la rattraper, la tirant à lui dans une étreinte, son coeur battant la chamade à cause de l'adrénaline.

-Madame ? Madame vous m'entendez ? Je suis Chan Woo, quel est votre prénom ?

Ses mains à présent posées sur les épaules frêles pour la garder à une distance suffisante pour mieux la voir et la rattraper si elle tentait de fuir, il ne put que constater la froideur de sa peau. Elle devait errer depuis un moment. La colère montait peu à peu, que les pourritures qui lui avaient ça aillent en enfer pensait-il.

- Madame ? Vous êtes gelée. Vous devriez au moins rentrer dans ce café, il y fait bon.

De peur de l'effrayer, le brun avait volontairement évité de dire que les lieux lui appartenaient, sa voix se faisant douce, un peu comme si il parlait à une enfant perdue. Lui attrapant la main pour la guider, toujours en faisant attention à ses réactions pour ne pas risquer de provoquer une explosion de violence, il la guida à l'intérieur. Ce fut en ouvrant la porte qu'un détail lui sauta aux yeux. Du sang.

-Vous saignez ? Êtes vous blessée ?

Merci papa et maman, Chan avait son brevet de secourisme, mais dans cette situation, ça ne lui servait pas à grand chose. Aucune idée de comment l'examiner sans la faire paniquer, puis si la blessure était trop large ou trop profonde, il pourrait tout au plus faire pression en attendant les secours. C'était bien sa chance d'avoir congédier ses assistants.

Peut-être qu’elle regrettait un peu son comportement, peut-être aurait elle du être plus prudente dans sa façon de faire les choses, ou simplement peut-être aurait elle du tout arrêter et ne plus se venger. Elle devait s’occuper de Kain, c’était absolument la chose la plus importante dans sa vie et pourtant Narcissa était là, à se venger, à torturer et se torturer de manière indirecte. Les choses vu ainsi, il y avait une certaine tristesse dans la façon d’être de la coréenne et dans sa vie de tout les jours, bien entendu.

Elle continuait de regarder autour d’elle, errant sans réel but, ne sachant aucunement où elle se dirigeait. Mais elle sentait pertinemment que son corps était sur le point de lâcher, puisant dans les dernières ressources restantes. Peut-être que la fin était vraiment là, jamais elle aurait cru finir ainsi en réalité. Elle se laissait glisser, s’abandonnant dans le désespoir, son corps chavirant dangereusement près de la route. Mais avant même qu’elle ne le réalise, quelqu’un venait de la rattraper. Narcissa était dans les bras d’un inconnu sans même comprendre ou réaliser. Tout allait trop vite, son esprit était perdu.

Il lui parlait et pourtant tout était flou. Elle essayait de le regarder mais les traits ne semblait pas distinct. Les mots n’avaient aucun sens, du moins elle devait vraiment se concentrer pour comprendre et encore plus pour trouver une réponse. « Nar… Narcissa. » dit-elle en butant sur chaque syllabe. Elle fronçait les sourcils, il y avait tellement de sons, de personnes autour d’elle. La coréenne ne connaissait jamais vraiment la peur mais pourtant quand ce genre de choses arrivait, c’était le premier ressenti qu’elle avait. Elle ne disait rien, mais elle ne reculait pas pour autant, se laissant même guider par Chanwoo. Une certaine aura se dégageait de lui qui se voulait presque rassurante du moins c’est ainsi que Narcissa voyait la chose.

L’intérieur se voulait cosy, la coréenne observait le lieu, trébuchant un peu sur le vide alors qu’elle avançait, totalement instable dans sa façon de marcher. Son esprit refusait de fonctionnait, ne trouvant aucun mot, incapable de faire une phrase de quatre mots. Elle avait surement l’air d’être une personne stupide. Chanwoo repris la parole et à la seconde où Narcissa pu comprendre ce qu’il disait, ses yeux se baissaient sur ses propres mains avant de les retirer et de même les cacher. Se recroquevillant sur elle-même. « Non, ce n’est… pas le mien. » Ses yeux se posaient sur une chaise, avant de la pointer délicatement du bout du doigt. « Je peux m’asseoir ? » Non pas que c’était nécessaire, mais légèrement quand même. Narcissa se sentait partir à la dérive et elle allait finir sur son fessier si elle restait debout un instant de plus.